Dialogue et enseignement — Introduction (2024)

(ΣΤΡΕΨΙΑΔΗΣ) Ἀλλ᾿ εἴπερ ἐκ τῆς καρδίας μ᾿ ὄντως φιλεῖς,

ὦ παῖ, πιθοῦ.

(ΦΕΙΔΙΠΠΙΔΗΣ) Τί οὖν πίθωμαι δῆτά σοι ;

(ΣΤΡΕΨΙΑΔΗΣ) Ἔκτρεψον ὡς τάχιστα τοὺς σαυτοῦ τρόπους,

καὶ μάνθαν᾿ ἐλθὼν ἃν ἐγὼ παραινέσω.

[…]

Ὁρᾷς τὸ θύριον τοῦτο καὶ τᾠκίδιον ;

(ΦΕΙΔΙΠΠΙΔΗΣ) Ὁρῶ. Τί οὖν τοῦτ᾿ ἐστὶν ἐτεόν, ὦ πάτερ ;

(ΣΤΡΕΨΙΑΔΗΣ) Ψυχῶν σοφῶν τοῦτ᾿ ἐστὶ φροντιστήριον.

[…]

(ΦΕΙΔΙΠΠΙΔΗΣ) Αἰβοῖ, πονηροί γ᾿, οἶδα. Τοὺς ἀλαζόνας,

τοὺς ὠχριῶντας, τοὺς ἀνυποδήτους λέγεις,

ὧν ὁ κακοδαίμων Σωκράτης καὶ Χαιρεφῶν.

(STREPSIADE) Mais, si tu m’aimes vraiment du fond du cœur, mon enfant, suis mon conseil.

(PHILIPPIDE) Et en quoi faut-il que je suive ton conseil?

(STREPSIADE) Change tout à fait et au plus vite ta manière de vivre, et va apprendre ce que je te recommanderai. […] Tu vois cette petite porte et cette petite maison? […] Des âmes sages c’est l’école, le «pensoir». […]

(PHILIPPIDE) Ah oui, les misérables, je les connais! Tu parles de ces charlatans, de ces faces blêmes, de ces va-nu-pieds dont font partie ce maudit Socrate et Chéréphon (Aristophane, Les Nuées 86-104 [ed. Coulon; trad. van Daele, modifiée]).

  • 1 Dubel 2011 distingue dans son introduction, p.250-253, «l’œuvre littéraire autonome», qui subsum (...)
  • 2 La présence de Socrate comme personnage de comédie dans les Nuées lors des Grandes Dionysies de 423 (...)
  • 3 Ainsi, dans la République, le personnage principal propose un programme éducatif complet.
  • 4 Vegetti 2006.
  • 5 Rossetti 2001.

1Dans ces premiers vers qui nouent l’intrigue des Nuées d’Aristophane nous est donnée à voir une scène qui concentre et résume les thèmes qui caractérisent l’articulation entre dialogue et enseignement: une conversation, faite de questions et de réponses, entre un père et son fils, soulignant l’importance d’une forme d’instruction au moment précisément où le jeune homme entre dans l’âge adulte et devient un citoyen à part entière. Cette cristallisation de l’alliance entre dialogue et enseignement s’accomplit dans la figure d’un enseignant bien particulier, celle de Socrate, à l’origine de la naissance, au IVe siècle a.C., du genre du dialogue comme œuvre littéraire autonome1. L’existence historique et littéraire de Socrate est associée à l’éducation de la jeunesse athénienne, dans la comédie2, comme dans les dialogues de Platon3, ceux de Xénophon ou encore d’Eschine et des autres Socratiques. Ainsi, comme l’ont montré Mario Vegetti4 ou encore Livio Rossetti5, la constitution de la littérature dite socratique, par le phénomène massif des logoi sokratikoi, est identifiable à des pratiques didactiques, en mettant en scène une relation maître-élève. Émergent dans cette période des expérimentations dans la prose de la forme dialogue, sur la modalité de la relation maître-élève, sur la question de la sophistique dans ces pratiques dialogales et sur les figures d’enseignants qui apparaissent, à côté de celle, particulière, de Socrate. On retrouve parmi elles celles des maîtres d’école, des philosophes et de leurs disciples, des sophistes, ou encore de personnages comme la prêtresse Diotime du Banquet, comme Aspasie chez Eschine et chez Platon dans le Ménexène —la liste n’est pas exhaustive.

  • 6 Sur la dimension apologétique de ces œuvres, cf. Danzig 2003; Danzig 2010.
  • 7 Ismard 2013, p.163-197, définit l’enseignement socratique comme éminemment subversif au sein de la (...)

2Si Socrate a pu apparaître comme une figure classique d’enseignant, le maître à penser ou à parler de la jeunesse dorée athénienne, il incarne aussi une figure-limite, mise en accusation et condamnée pour son rôle pédagogique ou anti-pédagogique selon les accusateurs du philosophe, comme l’illustre l’Apologie de Socrate de Platon ou de celle de Xénophon6. Parce qu’il se confronte à d’autres figures de la transmission du savoir, parce qu’il est à la fois éducateur et contradicteur, Socrate peut être perçu comme une figure nuisible de l’enseignement7.

  • 8 Dubel 2011, p.256-262.
  • 9 L’auteur du traité Du style, qui date peut-être à la fin du IIe siècle a.C., est assimilable au Ps (...)

3Dans la diachronie, la figure du philosophe athénien reste néanmoins structurante, à la croisée entre les pratiques dialogales et la question de la transmission des savoirs à la jeunesse. Comme le montre Sandrine Dubel8, dans son traité Du style, le rhéteur Démétrios définit un style propre à l’écriture du dialogue qui se détache de la représentation d’un éthos socratique9. Même si le genre littéraire est identifié à la figure auctoriale de Platon, la modalité dialogique, utilisable dans d’autres formes textuelles que le seul dialogue littéraire, est appelée «forme socratique». Démétrios donne alors pour exemple de cette forme un échange de paroles entre Socrate et un pais sous la forme de questions et de réponses, qui correspond à une pratique d’enseignement:

Quant à ce qu’on appelle proprement la forme socratique (qu’ont surtout cultivée, semble-t-il, Eschine et Platon), elle transformerait l’idée énoncée plus haut en interrogatoire, à peu près ainsi:

«Mon enfant, à combien se monte la fortune que t’a léguée ton père? C’est une fortune importante et difficile à estimer, n’est-ce pas?

—Oui, importante, Socrate.

—Eh bien, t’a-t-il aussi légué la science de t’en servir?»

  • 10 Démétrios, Du style 297-298, 297-298: Τὸ δὲ ἰδίως καλούμενον εἶδος Σωκρατικόν, ὃ μάλιστα δοκοῦσιν (...)

On a conduit l’enfant à son insu dans une impasse, on lui a rappelé son ignorance et on lui a enjoint de s’instruire, tout cela avec un éthos modéré et amène, et non pas, comme on dit, «à la manière Scythe». Ces sortes de dialogue fleurirent aussitôt inventés; bien plus, ils frappèrent le public par leur vertu imitative, leur évidence, et leurs admonestations pleines de magnanimité10.

  • 11 Diogène Laërce, Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres III, 49: τοῦ δὴ διαλόγου το (...)

4Dans la classification qu’il donne des dialogues de Platon11, Diogène Laërce distingue plusieurs sous-genres liés à l’enseignement: les dialogues du genre ὑφηγητικός (d’exposition), dialogues d’enseignement, théoriques ou pratiques et, parmi les dialogues consacrés à la recherche de la vérité, les dialogues gymnastiques, des dialogues d’entraînement dont font partie notamment les fameux dialogues maïeutiques C’est à la fois à travers les dialogues d’exposition et les dialogues maïeutiques que plusieurs sous-genres du dialogue sont liés à la notion d’enseignement. Diogène Laërce rappelle qu’il connaît la classification des dialogues en modes (mode dramatique, narratif, mixte), mais son approche permet de comprendre comment des sous-genres étaient identifiés et quelle place pouvait y tenir la notion d’enseignement.

  • 12 Cicéron, De l’orateur I, 99, où Crassus refuse la demande de Sulpicius d’exposer ses connaissances (...)
  • 13 Cicéron, De l’orateur II, 30: Nam et apud eos dicimus qui nesciunt et ea dicimus quae nescimus ips (...)

5Avec la figure-limite de Socrate, la Grèce a très tôt thématisé des figures diverses d’enseignants, tout en semblant remettre en question les pratiques traditionnelles d’enseignement, par le biais du dialogue philosophique, comme du théâtre et des représentations en images. À Rome, le même phénomène apparaît chez Cicéron: ceux qui sont en situation de transmettre ne veulent pas être des professeurs d’école. C’est le cas, dans De l’orateur, de Crassus12, ou encore d’Antoine, qui affirme être ignorant comme le sont tous les orateurs13, à un moment où la rhétorique s’apprend de manière de plus en plus standardisée chez les rhéteurs latins. Le De l’orateur propose en filigrane une remise en question de l’enseignement dans ces écoles pour tous, au profit d’une autre idée de la transmission des savoirs fondamentaux.

  • 14 Sur le tirocinium fori, cf. Goldbeck 2012.
  • 15 Cicéron, Plaidoyer pour Aulus Cluentius LI, 141 (à propos de l’auteur du De Iure ciuili): deinde u (...)

6Le dialogue devient à la fois une remise en question et une alternative littéraire à la dynamique de l’exemplum constitutive de l’enseignement des jeunes aristocrates romains. On pense ici au tirocinium fori, cet apprentissage des pratiques du forum et donc de la vie publique où les jeunes gens accompagnaient leurs aînés pour acquérir les ficelles du métier14. Si l’on garde cette pratique en mémoire, il est alors logique que le couple des figures de l’enseignant et de l’apprenant soit idéalement représenté par un père et son fils. C’est le cas, nous dit Cicéron, du premier dialogue romain, texte d’un certain Brutus, qui met en scène un père et un fils discutant de droit civil, dans une situation de transmission toute romaine du savoir —c’est-à-dire dans un cadre familial, au sein des propriétés du père15. Le même Cicéron a d’ailleurs recours plus tard à ce genre de mise en scène dans les Divisions de l’art oratoire, présentées elles aussi sous la forme de questions et de réponses entre Marcus et son fils:

CICERO FILIUS. Studeo, mi pater, Latine ex te audire ea quae mihi tu de ratione dicendi Graece tradidisti, si modo tibi est otium et si uis.

CICERO PATER. An est, mi Cicero, quod ego malim quam te quam doctissimum esse?[…]

C.F. Visne igitur, ut tu me Graece soles ordine interrogare, sic ego te uicissim eisdem de rebus Latine interrogem?

C.P. Sane, si placet. Sic enim et ego te meminisse intellegam quae accepisti, et tu ordine audies quae requires.

Cicéron fils: Je désire vivement, mon père, t’entendre m’exposer en latin les préceptes que tu m’as donnés en grec sur l’éloquence, si toutefois tu en as le loisir et si tu le veux.

Cicéron père: Te voir aussi savant que possible, est-il rien, mon cher fils, que je puisse préférer? […]

Cicéron fils: Veux-tu donc que, procédant comme toi, qui as coutume de me poser en grec des questions sur tous les points, moi, à mon tour, je te pose en latin des questions sur les mêmes matières?

Cicéron père: Certainement, si tu le désires. Par ce moyen, je verrai si tu as retenu ce qu’on t’a enseigné, et toi, tu m’entendras exposer sur tous les points ce que tu me demanderas (Cicéron, Divisions de l’art oratoire 1-2 [trad. Bornecque]).

  • 16 Massa-Pairault 2020. L’image que nous proposons est extraite de cette publication, à partir du site (...)

7La scène d’enseignement, telle qu’elle a été inventée par la Grèce classique, est abondamment illustrée comme le prouvent de nombreuses représentations en images des rapports entre enseignants et apprenants, à l’exemple de la célèbre «Mosaïque des philosophes»16. Cette dernière a été retrouvée dans la villa de Titus Siminius Stephanus à Pompéi et aurait été réalisée au début du Ier siècle a.C., en suivant probablement une source hellénistique. Elle représente une conversation entre philosophes, où les corps, les gestes, les postures sont autant d’éléments constitutifs de l’échange verbal.

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  • 17 Cicéron, De l’orateur I, 28-29.
  • 18 Platon, Phèdre 229 a-b; 230 b-d. Sur la reprise du cadre platonicien du Phèdre dans De l’orateur, (...)

8Dans un jardin, on devine deux colonnes et un arbre, un olivier ou un platane, tandis que sept philosophes, assis ou debout, en position de locuteurs, d’auditeurs ou encore de lecteurs, sont assis sur un banc semi-circulaire, une schola. Ces premiers éléments forment des topia, éléments typiques d’un lieu ou d’un paysage que l’on retrouve par exemple dans De l’orateur de Cicéron17, dans un héritage platonicien du Phèdre18. De même, le Traité des lois débute sur une interrogation que suscite un chêne, immédiatement perçu par Atticus comme le chêne du poème intitulé «Marius», lequel rappelle l’olivier de l’acropole d’Athènes (Cicéron, Traité des lois I, 1-2). L’exèdre se retrouve dans L’Amitié et permet de localiser les auditeurs (Cicéron, L’Amitié 2), tandis que dans le Brutus (Cicéron, Brutus 24), la statue de Platon affirme une verticalité qu’on retrouve dans la mosaïque qui nous intéresse.

  • 19 Rashed 2012.
  • 20 Rashed 2012, p.38.

9Les corps ont des attitudes variées, malgré l’impression de communauté qui se dégage de l’ensemble (les jeux de regards, la tenue debout ou assise, le fait que les personnages tiennent, tout en écoutant, un objet ou non dans la main, qu’ils aient ou non le visage tourné vers le locuteur, tout cela manifeste l’étonnante plasticité du sermo, parole qui est de mise dans des circuli mais qui se définit comme non pertinax (Cicéron, Les Devoirs I, 134). Le premier personnage en partant de la gauche de l’image semble avoir la parole, tandis que le personnage 2 tourne la tête vers lui, dans une attitude d’écoute. Le personnage 3 semble lui-même parler tout en désignant une sphère céleste, au premier plan, du bout de sa baguette. Est-ce Platon devant «son» platane? Tout se passe comme s’il y avait deux groupes d’auditeurs et deux situations d’enseignement, à partir d’un échange oral ou à partir d’un texte: le personnage 5 a la main sur son menton (s’agit-il d’Eudoxe, sous son cadran solaire?), le personnage 7, debout, tourné aussi vers le locuteur, semble davantage sur le départ et tient un uolumen à la main, à moins qu’il ne soit en train d’écouter le premier locuteur. Les interprétations sur le sens de cette représentation énigmatique sont nombreuses: s’agit-il des sept sages ou bien de membres de l’Académie? Si l’on suit l’hypothèse de Marwan Rashed19, l’artiste aurait voulu représenter «comment les membres de l’Académie se sont tournés vers le pythagorisme et son ontologie mathématisante»20. En tout cas, derrière ces locuteurs/ auditeurs en situation d’enseignement, semblent apparaître à l’arrière-plan les institutions dans lesquelles sont organisées ces enseignements, les lieux mêmes du savoir philosophique hellénistique: le Portique, l’Académie, le Jardin.

10Comme l’illustre cette mosaïque, face aux figures d’enseignants sont donc données à voir également des figures d’élèves, construites par le dialogue naissant, que l’on pense au jeune esclave du Ménon, aux jeunes gens de la jeunesse dorée d’Athènes ou encore aux propres rivaux de Socrate dans le domaine éducatif, les sophistes. Le dialogue a ainsi thématisé les figures d’enseignant et d’apprenant, tout en les interrogeant: qu’est-ce qu’un bon apprenant? Faut-il renoncer à être enseignant? Tout le monde est-il apte à recevoir un enseignement?

11Ce que sonde également le dialogue, c’est enfin son objet même: il remet en question la situation d’enseignement, son contenu, la méthode d’acquisition de la connaissance et la pédagogie. Qu’a-t-on besoin d’apprendre? C’est la leçon de l’Alcibiade platonicien: le contenu même de l’enseignement est l’objet d’un questionnement. Que faut-il savoir pour devenir un bon dirigeant? La réponse ne tient pas dans la transmission de savoir-faire pratiques ou même théoriques, mais dans la forme du dialogue elle-même. Elle interroge la vraie nature du savoir à acquérir.

12Le même phénomène se retrouve aussi à Rome, dans De l’orateur et de manière générale dans le dialogue cicéronien. Les maîtres à penser insistent sur l’association apparemment paradoxale de la rhétorique et de la philosophie et fondent une approche nouvelle de la pratique oratoire: les positionnements sur l’enseignement sont adoptés de façon différente de ce qui est fait et pensé ordinairement à Rome. La nouveauté ne réside donc pas tant sur les acteurs de l’enseignement, mais aussi parce que l’objet est pensé comme un objet nouveau. Par la suite, le dialogue peut être l’occasion d’une remise en question des champs disciplinaires. Ainsi, les savoirs techniques méritent-ils une disputatio philosophique? Peut-on proposer un dialogue scientifique? Dans ce pari innovant, l’expérimentation littéraire vise à modifier les limites d’un champ disciplinaire et leur perception.

  • 21 Voir sur ce point Cambron-Goulet 2023, p.167-169.

13Si l’objet du savoir et de l’enseignement est repensé, c’est également la modalité de transmission du savoir qui doit encore être interrogée, à savoir les types d’interactions qui favorisent l’enseignement dans l’acquisition des connaissances. De fait, le couple traditionnel «questions-réponses» n’a pas toujours la même dynamique et ne conduit pas toujours à la même exploration21: les «questions-réponses» permettent tour à tour de sonder l’ignorance, de solliciter un savoir que l’on n’a pas, de faire prendre conscience à des personnes dont le savoir est supposé acquis qu’ils ne savent rien. La mise en œuvre d’une réfutation par l’élenchos permet de vérifier l’acquisition du savoir, voire de construire un parcours de mémorisation et un parcours mental, pour ainsi dire, dans un travail collaboratif entre le maître et l’enseignant, comme le propose Cicéron à son fils dans les Divisions de l’art oratoire: le fils connaît les réponses des questions qu’il pose à son père, et la question apparaît comme un discours de la méthode.

  • 22 Sophocle, Œdipe roi 360-361: (ΤΕΙΡΕΣΙΑΣ): Οὐχὶ ξυνῆκας πρόσθεν; ἢ ‘κπειρᾷ λέγειν;/ (ΟΙΔΙΠΟΥΣ) (...)
  • 23 Koyré 1962, p.22-35.

14Au sein de ces jeux de questions et de réponses, plusieurs rôles, au sens presque théâtral du terme, sont envisageables et sont d’ailleurs envisagés par les personnages. Qui transmet et de quelle manière? Socrate et Tirésias sont de ce point de vue deux figures antithétiques qui interrogent l’efficacité du dispositif d’échange d’informations, lui-même remis en question par le dialogue. Ainsi, dans l’Œdipe roi de Sophocle, Tirésias, devin en pleine possession du savoir, a beau dire dès le début de la pièce à Œdipe la réalité de ses origines22, ces révélations ne sont pas entendues. En revanche, Socrate, qui se présente comme celui qui ne sait pas et interroge donc en non-sachant, ouvre justement la possibilité d’accéder à un savoir. Le jeu de rôle entre enseignant et enseigné, entre la personne qui interroge et celle qui répond, peut aussi, comme le montre l’échange des Partitions oratoires, être flottant, inversé. Dans la version latine que nous avons, c’est Marcus le fils qui pose les questions, tandis que dans l’exercice oral fait en grec, c’était le père qui assumait ce rôle. Le dialogue aime ainsi interroger les rôles qu’adoptent les personnages, quitte à les faire jouer à contre-emploi ou à leur permettre de les échanger, comme Gorgias et Socrate chez Platon. On voit par-là que le dialogue ne cherche pas la reproduction de techniques pédagogiques conservatrices et pose sans cesse la question de la bonne transmission, puisqu’il est rendu vain lorsque les choix de place et de rôles ne sont pas appropriés: ainsi, la vertu ne s’enseigne pas, en tout cas pas pour Ménon comme le rappelait Alexandre Koyré23.

15Outre le couple «questions-réponses», d’autres modalités de l’échange sont envisagées par le dialogue: c’est alors la pratique même du dialogue qui donne sa forme à la discussion et la transforme, comme l’illustre dans La Nature des dieux l’échange entre Cotta et Balbus:

  • 24 Cicéron, La Nature des dieux III, 4-5: «A Balbo autem animaduertisti, credo, quam multa dicta sin (...)

[Cotta]: «Balbus, en revanche, a exprimé un grand nombre d’idées —tu as pu le remarquer— et, même si elles sont erronées, elles sont étroitement liées entre elles et forment un ensemble cohérent. C’est pourquoi, comme je l’ai dit, je songe moins à réfuter son exposé qu’à poser des questions sur ce que j’ai mal compris. Je te laisse donc le choix, Balbus: préfères-tu me répondre point par point sur ce que je n’ai pas bien saisi ou m’écouter faire un exposé complet?» Balbus répondit: «Si tu souhaites certains éclaircissem*nts, je préfère procéder par réponses mais si tu veux m’interroger moins pour me comprendre que pour me réfuter, je ferai ce que tu voudras: je répondrai tout de suite à chacune de tes questions ou je ferai une réponse d’ensemble quand tu auras achevé ton exposé.» «Très bien, répondit Cotta, procédons comme nous y conduit la discussion.»24

  • 25 De Giorgio 2015.
  • 26 Cicéron, La Nature des dieux I, 56: Sed elatus studio uereor ne longior fuerim. Erat autem diffici (...)

16Enfin, c’est aussi le silence dans l’échange qui doit être envisagé25, qu’il soit induit par l’écoute ou suscité par la perplexité, qu’il soit encore la marque d’un conflit ou au contraire d’une adhésion. Cicéron insiste à plusieurs reprises sur le choix de l’écoute adopté par ses personnages. Ainsi, toujours dans La Nature des dieux, Velleius regrette son oratio perpetua et affirme qu’il aurait mieux fait d’écouter que de parler26. Marque de politesse, cette formule rappelle aussi l’importance fondamentale de l’écoute dans le processus d’apprentissage.

  • 27 C’est ce que postule Desclos 2001 pour les dialogues de Platon à propos de la formation du lecteur (...)

17Cette capacité à interroger les différents acteurs de la situation d’enseignement, l’enseignant, l’apprenant, les lieux, l’objet même de l’échange, fait-elle du dialogue, à son tour, un outil d’enseignement? Le dialogue contient-il des questions ou des savoirs? Peut-il à distance, hors de la situation d’échange concrète, former le lecteur? Y a-t-il un dialogue extradiégétique, une éducation par le dialogue27? Et, s’il y a un savoir, comment l’interpréter quand, comme chez Platon, le maître est caché? Comment comprendre ce qu’il y a à apprendre dans le dialogue? Peut-on voir le dialogue comme une forme qui forme?

18Pour répondre à ces questionnements, nous proposons un parcours de lecture en quatre temps. La première partie du dossier propose tout d’abord une analyse d’une méthode d’enseignement, l’échange de questions et des réponses par deux exemples concrets d’enseignement: celui du Panathénaïque d’Isocrate et celui des manuels scolaires et des scolies aux traités des grammairiens grecs et latins. Ces liens entre dialogue comme forme d’écriture et mise en scène d’une oralité à but pédagogique se retrouvent assez naturellement au théâtre. Un deuxième temps du dossier met en avant différentes figures de maîtres et d’élèves, sur la scène de la comédie latine, entre correspondants dans les Épîtres horatiennes, dans les épigrammes. C’est bien par le dialogue comme forme et comme outil pédagogique que le lien se fait ici entre des genres différents. Les rôles des enseignants et des apprenants sont alors rebattus: dans le dialogue comique, le personnage qui pose les questions ne parvient pas forcément à établir son autorité à la différence du maître des manuels scolaires. De même, les fonctions s’échangent: les senes de la comédie latine sont tournés en ridicule, la persona vieillissante d’Horace dans les Épîtres souligne l’importance du rapport d’amitié qui unit les correspondants, permettant la réforme morale du maître comme de l’élève. C’est donc bien dans la pratique même du dialogue que se met en place l’enseignement: le troisième temps du dossier se centre alors sur le moment cicéronien du dialogue. Dans les Tusculanes tout comme dans l’analyse que fait Carlo Sigonio des textes de l’Arpinate, le dialogue n’est pas seulement défini par l’alternance de questions/réponses, mais avant tout par l’exercitatio, l’exercice proposé aux participants du dialogue et aux lecteurs: se placer dans l’attitude mentale qui permet l’assentiment. Enfin, dans un dernier temps, la pérennité de l’utilisation de la forme du dialogue scientifique dans le temps, qu’il s’agisse de l’œuvre antique d’un Varron ou encore celle, moderne, d’un Fontenelle, souligne la puissance évocatrice de la forme dialogue dans le domaine pédagogique. Le dialogue scientifique reste néanmoins ambigu. L’ombre de Socrate plane dans le recours à l’humour, ce qui n’empêche pas, mais au contraire accompagne l’ambition didactique. Si les auteurs n’ignorent pas l’artificialité de la forme, cette dernière reste un moyen de légitimation, de valorisation du contenu de l’enseignement.

19L’échange de questions et de réponses, qui peut apparaître comme la modalité définitoire minimale la plus simple du dialogue, recouvre néanmoins une multiplicité de pratiques, dont l’efficacité pédagogique est discutée, voire contestée. Ainsi, Pierre Pontier, dans son analyse du Panathénaïque d’Isocrate, dernier et plus long discours de l’orateur, interroge l’usage que ce dernier fait de l’oralité et les limites de la pratique du dialogue. Si Isocrate, dans la réflexion pédagogique qui parcourt toute son œuvre, dénonce l’utilisation de séquences de questions/ réponses brèves, assimilées à l’éristique et à la dispute, il construit, à la fin du Panathénaïque, un dispositif complexe d’échanges avec ses disciples, qui s’organise par des prises de parole longues, où l’élève est appelé à critiquer le maître pour lui permettre de se corriger. Or, si le disciple progresse au cours du texte, puisqu’il abandonne une manière brève, et donc âpre, de parler, il n’en va pas de même avec le maître, Isocrate lui-même, qui porte à la fois la narration, l’échange et les propos rapportés au style direct.

  • 28 Sur ces corpus techniques, cf. Desbordes 2007, et plus particulièrement les chapitres «La fonction (...)
  • 29 Nous suivons ici la terminologie de Dorion 2007 qui distingue, chez Platon, l’elenchos rhétorique, (...)

20Dans une analyse concrète des matériaux d’apprentissage comme les manuels et les grammaires28, Manuela Callipo illustre la construction d’un modèle oral reposant sur l’échange de questions et de réponses au sein d’un cours, dans une discipline, la grammaire, pourtant vue comme une science écrite. Cette stratégie didactique ne se comprend pas alors comme un procédé de transformation de soi, comme le ferait l’elenchos dialectique socratique29, mais bien comme une possibilité de mémorisation, d’ancrage continu de la règle dans l’esprit de l’élève. À rebours de l’usage philosophique du dialogue, les indices d’oralité identifiés dans les scolies aux textes grammaticaux ne présentent pas les différentes options d’analyse possible, mais renforcent, par l’activité de correction des erreurs, la seule position de l’école à laquelle appartient l’auteur-grammairien. L’oralité qui nous est donnée à voir n’en est donc pas vraiment une.

  • 30 La même thématique se retrouve aussi chez le poète Perse (Satires V, 30-44), qui remercie son maîtr (...)

21La première partie du dossier a mis en lumière un orateur et ses disciples avec Isocrate, un enseignant au sens propre du terme et ses étudiants chez les grammairiens grecs et latins. Marion Faure nous donne de nouveau à voir d’autres figures de maîtres et d’élèves, celles que l’on retrouve sur la scène de la comédie latine chez Plaute. Comme l’a montré Pierre Pontier pour Isocrate à Athènes, c’est le délicat moment du passage à l’âge adulte qui est ici mis en avant à Rome30. Il s’agit d’un sujet définitoire de la palliata: l’adulescens sort du contrôle du magister, pour passer sous celui de la lena ou encore de son seruus callidus. Face à ces enseignants paradoxaux, le senex tente d’affermir son autorité sur sa progéniture. L’alternance des questions et réponses se substitue alors à l’utilisation des sententiae, même si ces praecepta sont, la plupart du temps, tournés en ridicule. La reprise des modalités d’expression de l’interlocuteur (comme des filles qui répondent par sententiae à leur père dans le Stichus) souligne combien l’échange entre les figures d’enseignants et celles d’enseignés cache surtout une lutte pour la maîtrise de la scène ludique.

  • 31 Cette posture du poète peut rappeler celle de Sénèque face à Lucilius dans la lettre 27, 1, où le p (...)

22Au rire franc de la comédie latine peut faire pendant la pratique du spoudaiogeloion présente dans les poésies horatiennes: Robin Glinatsis souligne que, dans la réforme morale qu’Horace propose aux destinataires de ses Épîtres, présentés comme ses amis, le poète latin refuse un enseignement trop austère. Dans ce qu’il présente comme des sermones, des propos qui s’apparentent à la conversation quotidienne, la réaction du destinataire de l’épître n’est pas présente. Elle est cependant prise en compte par Horace, par sa conception, héritée à la fois de Cicéron et de l’épicurisme, de l’amicitia, qui se fonde sur la similitude des amis entre eux et la libertas dans les propos tenus. La persona d’Horace dans les Épîtres est à ce titre à la fois celle de celui qui enseigne, qui pousse à la réforme morale, mais aussi de celui qui, en tant que proficiens, parce qu’il est lui-même malade31, doit profiter de l’échange avec ses amis, dans une pratique parénétique qui le cible lui aussi.

  • 32 Cambron-Goulet 2023, p. 165: «La compréhension du monde est donc intimement liée au dialogue; ce (...)

23Le brouillage de la persona du locuteur et de ses destinataires dans les Épîtres d’Horace, entre réalité et construction, fait écho au genre même de l’épigramme: énoncés utilitaires, particulièrement dans le cas des épitaphes, ces dernières acquièrent, à partir du IVe siècle, une dimension fictive et, par-là, littéraire. Hamidou Richer souligne plusieurs modalités dialogiques au sein des épigrammes. On retrouve ainsi un face-à-face entre l’objet (parlant) et la personne humaine, ou encore la mise en place de différents tours de parole au sein de la même pièce. Vecteur d’informations, l’épigramme peut également, par le biais des échanges entre les différentes voix, construire un savoir, une herméneutique du monde32. Ainsi, la description de la statue du dieu Kairos par Lysippe de Sicyone permet à la fois de connaître un objet disparu, mais surtout, par l’échange de questions et réponses au sein des tours de parole, d’analyser la représentation qui est faite de l’allégorie d’une notion abstraite. C’est par le dialogue que les choix esthétiques faits par Lysippe, qui résistent à la seule saisie sensorielle, peuvent être explicités et compris.

  • 33 Sur l’articulation des deux formes, François 1963.

24En revenant à l’analyse du genre du dialogue proprement dit, et plus particulièrement aux Tusculanes, Laurence Schirm donne à voir la constitution par Cicéron d’une école pour ses amis, dont il serait le scholarque. Rejetant la simple disputatio et le modèle des questions/ réponses, il propose la mise en place d’une declamatio senilis33, qui suppose trois temps: la mise en forme de l’argument, son développement, le jugement porté sur lui. L’apprentissage porte donc aussi sur la capacité à juger de l’articulation même des propos tenus et à donner son assentiment à un discours qui semble vrai. Se crée alors un exercice constant de disputatio qui n’est pas la pratique de la discussion directe, de l’échange, mais bien l’appréciation que l’on peut donner de l’articulation de différents arguments, comme le montre le passage d’une oratio perpetua à une oratio continens. Cette exercitatio constante est pratiquée par les différents élèves présents dans les cinq livres des Tusculanes, parmi lesquels on distingue plusieurs types d’auditeurs (le jeune homme ingénieux, celui, plus âgé, qui maîtrise les exposés doxographiques…), comme autant de rôles théâtraux.

  • 34 Sur ces questions, cf. Lévy 1992.
  • 35 Sur la question, voir aussi Spranzi Zuber 2006.
  • 36 Cf. sur ce point Lévy 2018.

25C’est à une réflexion analogue que nous convie Alain Petit. Partant de l’analyse que donne le philologue humaniste Carlo Sigonio de la forme du dialogue, il apparaît que la pratique de la disputatio in utramque partem, la forme de dialectique dans le dialogue cicéronien, n’aboutit pas comme on pourrait s’y attendre dans un premier temps, à une présentation équilibrée de chaque thèse en présence. Le recours au vraisemblable (pithanon) qui accompagne la suspension du jugement carnéadéenne est l’expression d’une préférence, par laquelle l’esprit retrouve sa faculté de jugement34. Pour «combler les manques», Sigonio articule alors la théorisation d’Aristote de la dialectique et des endoxa dans les Topiques et ses réflexions sur le dialogique dans la Poétique aux exempla pratiques que constituent les dialogues cicéroniens35. Or, l’utilisation du même terme probabile par Cicéron pour ces deux termes pourrait conduire à penser que les deux termes sont superposables, mais c’est au contraire ce rapprochement qui fait du dialogue cicéronien un outil de détection du vraisemblable et le lieu d’exercice de la libertas iudicandi. À ce titre, le dialogue n’enseigne pas, il présuppose et renforce une attitude mentale d’analyse, par l’arrière-plan sceptique que suppose la forme même du genre36.

  • 37 Narducci 1997, p.32.

26Contemporain de Cicéron, Varron se rapproche doublement de l’Arpinate: comme pour la philosophie à Rome, il innove en proposant de façon originale un traité d’agriculture latin sous la forme d’un dialogue en trois livres, L’Économie rurale. De plus, sa pratique du genre se rapproche largement, comme le montre Maëlys Blandenet, de celle de Cicéron lui-même, par l’emploi d’un cadre spatio-temporel spécifique à chaque livre, dans lequel évoluent, comme dans les dialogues cicéroniens, des personnages qui appartiennent à l’élite économique et politique de Rome. Le passage de l’elenchos à la disputatio in utramque partem semble alors rendu nécessaire pour le respect du decorum entre pairs37. Néanmoins, à la différence des dialogues cicéroniens qui se déroulent dans des villas privées, Varron choisit de situer la scène dans un édifice public. Le choix de la forme dialogique ne peut être vu comme un simple artifice littéraire plaisant car le dispositif didactique créé par Varron vise à donner à l’agriculture le statut d’une véritable science. Le discours continu permet alors de faciliter la compréhension de la matière technique, qui est structurée par les interventions des interlocuteurs, personnages auxquels le lectorat visé peut s’identifier. Par le dialogue, Varron vise à créer une scientia qui, à la différence d’une expérience, peut se transmettre, s’enseigner.

  • 38 On peut ici penser à la figure d’Alcibiade qui nous est donné à lire dans le Banquet de Platon, mai (...)

27Si dans l’Antiquité le dialogue est vu comme la forme d’enseignement privilégié, la situation est bien différente aux XVIIe et XVIIIesiècles. Comme l’explique Fabrice Chassot, bien que Platon bénéficie toujours d’une forte aura, le dialogue n’apparaît pas comme un médium pédagogique approprié, ni en termes de formation, ni en termes de transmission de doctrine. Le cadre est alors celui d’une imitation des discussions des salons, impropres, selon Hume, à une démonstration scientifique pour laquelle prévaut le modèle mathématique, sans les digressions que suppose la conversation. Le XVIIIesiècle cristallise pourtant un moment de recréation du dialogue scientifique, vite supplanté néanmoins par le nouvel instrument pédagogique que sont les encyclopédies. Si la spécialisation des connaissances scientifiques rend difficile la pratique d’une forme de dialogue héritée de Platon où le savoir pourrait dériver de la pratique de l’elenchos, le refus du pédantisme caractéristique de l’époque constitue le deuxième écueil pour la persistance de la forme du dialogue scientifique comme transmission pure de contenus. Il joue alors un autre rôle, celui d’éveil à la science, de légitimation et de propagande pour cette dernière, comme a pu le faire un Varron. En ce sens, il convient de montrer chez l’élève, la Marquise chez Fontenelle, une transformation par son intérêt croissant pour la science, lequel s’accompagne d’une dimension de séduction: le philosophe répond à un désir de savoir, dans lequel peut se lire un écho de la figure d’Alcibiade38. Il y a bien une dimension émotionnelle dans la progression vers la vérité, puisque le dialogue procure du plaisir. Cette forme de dialogue constitue donc une nouvelle innovation pédagogique où la supériorité intellectuelle du philosophe par rapport à son élève est tempérée par l’esthétique galante, permettant ainsi l’échange, et donc l’enseignement.

28Les textes réunis ici constituent les Actes du colloque international intitulé «Dialogue et enseignement» qui s’est tenu à l’Université de Rouen-Normandie du 29 novembre au 1er décembre 2018 grâce au soutien des laboratoires normands de l’ERIAC (UR 4705)39 et de l’IRHIS40, du laboratoire du Celis (UR4280) de l’Université Clermont-Auvergne41, ainsi que du Collège Sévigné42. Ces travaux s’inscrivent dans le cadre de recherches sur le dialogue antique comme forme littéraire autonome et sur ses prolongements dans la littérature européenne, menées depuis 2009 par le programme de recherche «Dialogos» du Celis43, en partenariat avec diverses équipes en France et à l’étranger. Ils ont permis la publication de plusieurs volumes collectifs44. Les journées rouennaises ont par ailleurs fait l’objet d’une captation audio-visuelle, librement consultable sur la Web-TV de l’Université de Rouen-Normandie45. Nous remercions profondément Mathilde Cambron-Goulet et Pascale Fleury d’avoir accepté ce dossier au sein des Cahiers des Études Anciennes.

29Auvray-Assayas, C., 2001. «Réécrire Platon? Les enjeux du dialogue chez Cicéron», in F.Cossutta & M.Narcy (eds), La forme dialogue chez Platon: évolutions et réceptions, Grenoble, Jérôme Millon, p.237-255.

30Benferhat, Y., 2007-2008. «Un philosophe doit-il vivre les pieds dans l’eau? Retour sur un topos: Phèdre à Rome», Caesarodunum41-42, p.339-352.

31Bonandini, A., L. Boulègue & G. Ieranò (eds), 2023. Le Dialogue de l’Antiquité à l’âge humaniste. Péripéties d’un genre dramatique et philosophique, Paris, Classiques Garnier.

32Briand, M., S. Dubel & A. Eissen (eds), 2017. Rire et dialogue, Rennes, La Licorne.

33Cambron-Goulet, M., 2023. Partager les savoirs. Pratiques orales et écrites de la philosophie dans l’Antiquité, Paris, Classiques Garnier.

34Chiron, P., 1993. Démétrios. Du Style, Paris, Les Belles Lettres.

35Clay, D., 1994. «The Origin of Socratic Dialogue», in P.A.van der Waerdt (ed.), The Socratic Movement, Ithaca, Cornell University Press, p.23-47.

36Danzig, G., 2010. Apologizing for Socrates. How Plato and Xenophon Created our Socrates, Lanham/ Boulder/ New York/ Toronto/ Plymouth, Lexington Books, 2010.

37Danzig, G., 2003. «Apologizing for Socrates: Plato and Xenophon on Socrates’ Behaviour in Court», Transactions of the American Philological Association 133, p.281-321.

38De Giorgio, J.-P. & A.-M. Favreau-Linder (eds), 2019. La diatribe antique. Enquête sur les formes dialogiques du discours philosophique, Paris, Lambert-Lucas.

39De Giorgio, J.-P., F. Laurent & F. Le Borgne (eds), 2016. Espace-temps du dialogue littéraire, Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise-Pascal.

40De Giorgio, J.-P., 2015. «Auditeurs et personnages muets dans le dialogue: quelques remarques sur la définition d’un genre réinvesti à Rome», in S.Dubel & S.Gotteland (eds), Formes et genres du dialogue antique, Bordeaux, Ausonius, p.107-126.

41Desbordes, F., 2007. Idées grecques et romaines sur le langage. Travaux d’histoire et d’épistémologie, G.Clerico, B.Colombat & J.Soubiran (eds), Lyon, ENS Éditions, 2007.

42Desclos, M.-L., 2001. «L’interlocuteur anonyme dans les Dialogues de Platon», in F.Cossutta & M.Narcy (eds), La forme-dialogue chez Platon. Évolution et réceptions, Grenoble, Jérôme Millon, p.69-97.

43Dorion, L.-A., 2007. «Elenchos dialectique et elenchos rhétorique dans la défense de Socrate», AntPhilos1, p.75-90.

44Dorion, L.-A., 1990. «La subversion de l’“elenchos” juridique dans l’“Apologie de Socrate”», RPhL79, p.311-344.

45Dubel, S. & S.Gotteland (eds), 2015. Formes et genres du dialogue antique, Bordeaux, Ausonius.

46Dubel, S., 2011. «Définir le dialogue antique comme mimésis, entre forme théâtrale et conversation: des sokratikoi logoi (Aristote) au style du dialogue (Ps.-Démétrios)», in A.Létourneau, F.Cooren & N.Bencherki (eds), Representations in Dialogue, Dialogue in Représentations. Proceedings of the 13th Conference of the International Association for Dialogue Analysis, iada.online.series 1, 11, p.249-264.

47Favreau-Linder, A.-M., S. Franchet d’Espèrey & A.Rehbinder (eds), 2022. Dialogue, dialogisme et polyphonie, Questions d’énonciations dans les textes rhétoriques et philosophiques de l’Antiquité, Bordeaux, Ausonius.

48François, G., 1963. «“Declamatio” et “disputatio”», AC32, p.513-540.

49Goldbeck, F., 2012. «Strategien der Wissensvermittlung in Rom. Zum sog. tirocinium fori in der späten Republik und der frühen Kaiserzeit», in T.Fuhrer (ed), Performanz von Wissen, Strategien der Wissensvermittlung in der Vormoderne, Heidelberg, Universitätsverlag Winter, p.71-94.

50Ismard, P., 2013. L’événement Socrate, Paris, Flammarion.

51Koyre, A., 1962. Introduction à la lecture de Platon, suivi de Entretiens sur Descartes, Paris, Gallimard.

52Lévy, C., 2018. Les scepticismes, Paris, Presses Universitaires de France.

53Lévy, C., 1992. Cicero academicus. Recherches sur les Académiques et sur la philosophie cicéronienne, Rome, Collection de l’École française de Rome.

54Massa-Pairault, F.-H., 2020. «De l’Académie au Musée: regards sur la mosaïque “des Philosophes” (MANN 124545)», RA69, p.29-83.

55Müller, G. M. (ed.), 2021. Figurengestaltung und Gesprächsinteraktion im antiken Dialog, Stuttgart, Steiner.

56Narducci, E., 1997. Cicerone e l’eloquenza romana, Retorica e progetto culturale, Rome/ Bari, Laterza.

57Rashed, M., 2012. «La mosaïque des philosophes de Naples: une représentation de l’académie platonicienne et son commanditaire», in C.Noiret & N.Ordine (eds), Omnia in Uno. Hommage à Philippe Segonds, Paris, Les Belles Lettres, p.27-49.

58Rossetti, L., 2001. «Le dialogue socratique in statu nascendi», PhilosAnt 1, p.11-35.

59Spranzi Zuber, M., 2006. «Le Traité du dialogue de Carlo Sigonio et la dialectique d’Aristote», in P.Guérin (ed.), Le dialogue ou les enjeux d’un choix d’écriture (pays de langues romanes), Rennes, Presses universitaires de Rennes, p.203-217.

60Vegetti,M., «La letteratura socratica e la competizione fra generi letterari», in F.Roscalla (ed.), L’autore e l’opera: Attribuzioni, appropriazioni, apocrifi nella Grecia antica, Atti del convegno internazionale (Pavia, 27-28 maggio 2005), Pise, ETS, p.119-132.

61Von Möllendorf, P. & G.M.Müller (eds), 2022. Gespräch und Erzählung. Strategien und Funktionen des Narrativen im antiken Dialog, Stuttgart, Steiner.

62Zetzel, J. E.G., 2003. «Plato with Pillows: Cicero on the Uses of Greek Culture», in D.Braund & C.Gill (eds), Myth, History and Culture in Republican Rome, Studies in honour of T.P.Wiseman, Exeter, University of Exeter Press, p.119-138.

Dialogue et enseignement — Introduction (2024)

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